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Propriétaire de l’UGC : à qui appartient le géant du cinéma ?

Il y a des chiffres qui ne mentent pas et des alliances qui bousculent le paysage : la famille Saadé détient désormais 20 % du capital de Pathé, à la suite d’une opération finalisée début 2024. Cette entrée marque la première incursion significative du groupe familial, déjà présent dans le transport maritime, dans l’industrie cinématographique.

Pathé, acteur historique du cinéma en France, conserve la majorité de son capital, tandis que l’arrivée de ce nouvel actionnaire recompose la structure de gouvernance. Cette évolution capitalistique survient dans un contexte de mutation profonde du secteur, où la concentration et la diversification des investissements redéfinissent les équilibres du marché.

La famille Saadé entre au capital de Pathé : un tournant pour le cinéma français

Le décor se transforme pour le cinéma français. CMA CGM, géant du transport maritime mené par Rodolphe Saadé, prend place parmi les décisionnaires en acquérant 20 % du capital de Pathé. Ce mouvement, discret mais déterminé, insuffle une énergie nouvelle dans un secteur resté longtemps dominé par des familles fondatrices. Pathé, sous la houlette de Jérôme Seydoux, garde la majorité, mais l’ancrage marseillais de la famille Saadé vient clairement redistribuer les cartes.

L’arrivée de ce nouvel actionnaire n’est pas neutre. Pathé, déjà à la tête de 130 cinémas et 1 316 écrans dans l’Hexagone, prend une dimension qui dépasse largement son héritage plus que centenaire. L’entreprise ne se cantonne plus à la diffusion : elle devient un point de rencontre entre industrie lourde et culture populaire. Deux univers s’interpénètrent : la puissance logistique et financière des Saadé rencontre le savoir-faire cinéma capitalisé depuis des générations chez Pathé. Pour nombre de fortunes françaises, les actifs culturels séduisent de plus en plus, car ils conjuguent image, résilience et influence.

Pour mieux prendre la mesure de ce rapprochement, quelques données clés s’imposent :

  • 130 cinémas affichant l’enseigne Pathé, pour un total de 1 316 écrans
  • CMA CGM, troisième armateur mondial, qui s’invite au capital
  • Jérôme Seydoux qui conserve la présidence du groupe

Cette dynamique enrichit la stratégie de développement. Pour Pathé, intégrer un partenaire industriel ouvre la voie à des synergies inédites, donne un nouvel élan à l’investissement et étend la projection du groupe hors de l’Hexagone. Pour les Saadé, cette prise de participation marque un signal clair : leur empreinte s’affirme désormais jusque dans le patrimoine culturel. Le marché observe désormais ce duo nouveau : réussira-t-il à dynamiser le groupe Pathé face à la montée en puissance des plateformes mondiales ?

Quels changements attendre de l’investissement de 20 % dans Pathé ?

L’entrée de CMA CGM, pilotée par Rodolphe Saadé, rebat les cartes du secteur. Avec 20 % du capital, l’armateur pèse sur les orientations sans prendre le contrôle. Pathé bénéficie de ressources accrues pour accélérer la rénovation de ses salles et renforcer son activité de production, dans une industrie où la compétition internationale devient chaque jour plus vive.

Le développement des infrastructures s’annonce comme une priorité. Avec ses 130 cinémas et 1 316 écrans, Pathé va pouvoir investir dans de nouveaux lieux et viser des territoires jusque-là moins accessibles. Cette ambition s’inscrit dans une perspective européenne, avec une volonté affichée de tenir tête aux géants du streaming tout en consolidant la position du groupe sur le continent.

Côté production, l’entrée de ce nouvel investisseur donne à Pathé la capacité de monter davantage de films et de séries au potentiel international. La stratégie s’oriente clairement vers la conquête de publics hors frontières et l’attraction de talents venus d’ailleurs. La puissance financière soutient ici la prise de risque artistique : plus de projets d’ampleur, plus de visibilité offerte aux créations du groupe.

La gouvernance, elle, reste incarnée par Jérôme Seydoux. L’alliance entre Paris et Marseille, entre la densité financière des Saadé et la tradition du cinéma à la française, façonne un équilibre inédit. Chacun son rôle : Pathé garde la main sur l’opérationnel, tandis que CMA CGM s’impose comme un soutien à long terme et un levier stratégique. Le cinéma français se trouve ainsi porté par un nouveau souffle, entre culture et industrie, audace et solidité.

Main tenant un ticket de cinéma UGC avec sièges rouges en arrière-plan

Un nouvel équilibre pour l’industrie : impacts et perspectives pour le secteur cinématographique

La répartition du pouvoir évolue dans le cinéma français. Alors que Canal+ et Vincent Bolloré finalisent le rachat potentiel d’UGC, troisième réseau national avec 48 cinémas en France, dont l’emblématique Ciné Cité Les Halles à Paris, le secteur s’apprête à voir émerger un acteur d’une tout autre envergure. Canal+, de son côté, occupe déjà la place de premier investisseur privé du secteur, avec 220 millions d’euros apportés chaque année à la filière. Cette montée en puissance inquiète une frange de la profession : une concentration accrue pourrait mettre à mal la diversité de l’offre. Des organisations comme le Bloc et la SRF tirent la sonnette d’alarme sur l’articulation entre intérêts financiers et liberté éditoriale.

Le contexte n’arrange rien : selon le CNC, la fréquentation des salles a reculé de 13,6 % sur les sept premiers mois de 2025. Cette baisse fragilise toute la filière. Dans le même temps, des groupes internationaux déjà très présents dans la production et la diffusion accentuent leur contrôle sur de nouveaux maillons de la chaîne. Les acteurs historiques, Canal+ en tête, s’efforcent de protéger leur présence de la création au grand écran.

Pour mieux comprendre les difficultés soulevées par le secteur, voici les principaux points évoqués :

  • La maîtrise du réseau de salles devient stratégique pour préserver les revenus
  • Les producteurs indépendants redoutent un accès plus restreint aux écrans
  • Les instances publiques, telles que l’Autorité de la concurrence et le ministère de la Culture, suivent la situation avec vigilance

Un autre signal : Pierre-Edouard Stérin investit dans des expériences immersives avec Sandora. Pathé, tout comme UGC, s’attache de son côté à défendre une souveraineté culturelle à la française, même si chacun avance selon ses propres méthodes. Le paysage se modifie à vue d’œil ; la pluralité, chérie par les professionnels, doit désormais trouver sa place dans un environnement ouvert à tous les vents et où des ambitions inédites s’affirment.

Le cinéma français se redéfinit, pris entre héritage, nouveaux investissements et course à l’attention. Impossible de prédire dès aujourd’hui qui signera le prochain grand chapitre de cette histoire, mais chacun aura désormais un œil rivé sur cette nouvelle partie qui s’engage.